Imagination pratique
Pascal Wicht redéfinit l’imagination comme une capacité humaine fondamentale, distincte de la créativité, qui nous permet de projeter au-delà de la perception immédiate et de construire du sens face à l‘incertitude. Cette faculté, opérant à l’intersection de la perception, la mémoire, la culture et l’éthique, est socialement façonnée mais souvent marginalisée dans nos sociétés qui privilégient ce qui est quantifiable. Les imaginaires, quant à eux, fonctionnent comme des constructions sociales partagées qui peuvent soit renforcer les systèmes dominants, soit les remettre en question.
Wicht soutient que « l’imagination pratique » n’est pas un luxe mais une nécessité culturelle et politique qui doit être décolonisée en reconnaissant des imaginaires alternatifs (cosmologies indigènes, traditions spéculatives noires, temporalités féministes) offrant des visions plus relationnelles du futur, contre les cadres dominants technocratiques.
La fiction, un puissant outil de prospective
Un excellent article de Maïté Butaije, qui présente le carnet d’exploration L’Humain à l’ombre des techno-conflits, ou elle utilise la fiction comme outil de réflexion stratégique pour anticiper les défis humains liés à l’innovation militaire–deux autres carnets survolés s’attardent eux à la santé et à la crise climatique. À travers huit récits, le carnet met en scène des personnages confrontés à des situations de combat où les frontières entre l’humain et la machine se brouillent, traitant de thèmes tels que la manipulation psychologique et les dilemmes éthiques. Ce projet hybride s’adresse à divers publics, incluant des professionnels de la défense et des chercheurs, et vise à rendre accessibles des enjeux complexes grâce à une approche immersive. Butaije souligne l’importance de la fiction pour ouvrir des horizons, susciter l’empathie et encourager une réflexion collective sur les futurs possibles.
En thérapie… avec les chatbots
Analyse de la tribune de Maytal Eyal dans Time Magazine, concernant l’essor des chatbots thérapeutiques et leurs implications sociétales. Bien que ces IA offrent une thérapie accessible 24h/24 et sans jugement, Eyal souligne que les frictions inhérentes aux relations humaines sont essentielles au processus thérapeutique. L’Association des psychologues américains a émis une alerte contre ces chatbots qui, programmés pour valider plutôt que questionner, peuvent encourager des comportements dangereux. L’article élargit cette critique à d’autres domaines comme l’orientation scolaire, où les chatbots risquent d’éroder la création de liens sociaux essentiels. Il conclut en plaidant pour une conception différente de l’IA qui servirait à renforcer les relations humaines plutôt qu’à les remplacer, suggérant que nous devrions exiger des technologies qui améliorent nos connexions interpersonnelles au lieu de nous en isoler.
◗ À combiner avec les articles ci-dessus sur l’imagination et la fiction, L’Empire: les gendarmes et les extraterrestres. « Le but avoué de Bruno Dumont, ancien professeur de philosophie reconverti au cinéma, son premier amour, était de se demander pourquoi le monde est comme il est, par l’entremise d’une approche mythique. »
◗ De la Première Guerre mondiale à l’ère Trump : une brève histoire de l’exil scientifique. « Alors que trois chercheurs sur quatre songent à fuir les États-Unis pour échapper à la politique trumpienne, Usbek & Rica revient sur les périodes clés qui ont façonné la notion d’exil scientifique et se projette sur son évolution à venir. »
◗ Intéressante initiative québécoise, Badge AI « vous aidera à déterminer dans quelle mesure votre processus créatif utilise l’intelligence artificielle. Inspiré du modèle Creative Commons, notre badge offre une transparence sur la genèse de votre œuvre. » Dans un régistre plus rigolo, La Vignette Tech « c’est un moyen simple, fun et efficace d’inciter chacun à garder son téléphone ou son ordi une année de plus. »